FRAGMENT 14. Cristallisation
Quel est l’objet de la nostalgie désidérée, de l’irrépressible mélancolie humaine ? Comment ce que nous ressentons obscurément et confusément comme un bien suprême ou l’objet ultime de notre désir, pourrait se manifester comme manque si nous ne l’avions jamais connu auparavant ?
“Désidération” nous invite à plonger dans une recherche cosmique, anthropique et anthropologique qui bouscule nos représentations du fini et de l’infini, l’existence de l’espace et du temps. La quête des désidérés pourrait nous conduire à découvrir un absolu poétique dans une réconciliation ultime. Ils nous convient à renouer avec l’étymologie de notre désir, de notre origine, d’accepter l’infini comme une partie de nous. Cosmiel propose un voyage trans-dimensionnel ; l’absorption de Lune questionne symboliquement le genre des désidérés. Plus troublant, un astronome désidéré ne pourrait se soigner qu’en fusionnant intégralement avec son sujet d’étude : un tel geste abolirait alors toute distinction entre arts et sciences.
La découverte de ces premiers fragments nous engage dans une recherche de terrain afin de recenser les désidérés, les rencontrer et visiter les cratères d’impact qui les attirent. Cette phase doit s’accompagner d’une recherche historique pour localiser dans le temps, l’espace et les cultures le désidéré-0 afin de comprendre la nature et l’origine de la désidération. L’existence de deux patients avérés permet de développer la première recherche scientifiquement documentée du protocole d’implant lunaire, d’en étudier son efficacité et ses effets, tant physiologiques que symboliques.
L’implantation lunaire des désidérés est un geste d’altérité. Une altérité ouvrant sur une redéfinition d’une identité, d’un genre nouveau, qui se cristallise autour de cet absolu cosmique qu’est la poésie. La Lune, domaine du rêve, de la vie nocturne, et de l’inconscient, est aussi celui mystérieux du double. Ce double est un reflet dans le miroir : semblable sans être identique. La Lune révèle notre autre face, une face cachée, oubliée, que l’implant réinjecte en nous.
L’altérité s’incarne rituellement dans l’intrication des implantés. Tout contenant tout, l’absorption de Lune, symbole de l’amour fusionnel, abolit la notion de l’autre. L’altérité devient identité.